Le paradoxe de Saint-Pétersbourg

Introduction

Parfois, les mathématiques nous réservent des surprises qui bousculent complètement notre intuition. C’est le cas du paradoxe de Saint-Pétersbourg, un problème célèbre inventé au XVIIIᵉ siècle autour d’un simple jeu de pile ou face.

I. Présentation du paradoxe et mise en équation

1. La règle du jeu

On considère un jeu aléatoire avec une pièce équilibrée (probabilité [math]\tfrac12[/math] pour «pile», [math]\tfrac12[/math] pour «face»).

On lance la pièce jusqu’à obtenir pour la première fois «pile». Le gain dépend du rang du premier «pile» :

  • «pile» au 1er lancer [math]\Rightarrow[/math] gain [math]2[/math] € ;
  • «pile» au 2e lancer [math]\Rightarrow[/math] gain [math]4[/math] € ;
  • «pile» au [math]k[/math]-ième lancer [math]\Rightarrow[/math] gain [math]2^k[/math] €.

Autrement dit, si l’on note [math]X[/math] la variable aléatoire «gain du joueur», alors :

\quad X = 2^K \quad \text{où } K \text{ est le rang du premier «pile».}

La loi de [math]K[/math] est géométrique (version «nombre d’essais jusqu’au premier succès») :

\mathbb{P}(K = k) = \left(\tfrac12\right)^k \quad (k \ge 1),

car il faut [math]k-1[/math] fois «face» puis «pile» au [math]k[/math]-ième lancer.

On en déduit la loi de [math]X[/math] :

\mathbb{P}(X = 2^k) = \mathbb{P}(K = k) = \left(\tfrac12\right)^k \quad (k \ge 1).

2. Calcul de l’espérance

Par définition (loi discrète), l’espérance du gain est :

\displaystyle \mathbb{E}[X] = \sum_{k=1}^{\infty} (2^k)\mathbb{P}(X=2^k) = \sum_{k=1}^{\infty} 2^k \left(\tfrac12\right)^k.

Or :

2^k\left(\tfrac12\right)^k = \left(2 \cdot \tfrac12\right)^k = 1^k = 1.

Donc la série devient simplement :

\displaystyle \mathbb{E}[X] = \sum_{k=1}^{\infty} 1 = +\infty.

Conclusion (paradoxale) : l’espérance du gain est infinie. D’un point de vue purement théorique, on pourrait en déduire qu’il serait «rationnel» d’accepter de payer n’importe quel prix pour jouer… ce que personne ne fait en réalité. C’est précisément là le paradoxe de Saint-Pétersbourg : une espérance mathématique infinie qui contredit le bon sens économique.

II. Pourquoi l’intuition est trompeuse

1. Confrontation avec la réalité

À première vue, une espérance infinie devrait rendre ce jeu «imbattable». Pourtant, dans la pratique, personne ne serait prêt à miser une fortune pour y jouer. Pourquoi ? Parce que les gros gains sont extrêmement rares.

Prenons quelques exemples numériques :

  • Pour gagner au moins [math]16[/math] € (ce qui correspond à obtenir «pile» au plus tard au 4ᵉ lancer, donc gain [math]\geq 2^4 = 16[/math]), la probabilité est :
\mathbb{P}(X \geq 16) = \left(\tfrac12\right)^4 = \tfrac{1}{16} \approx 6,25 \%.
  • Pour gagner au moins [math]1000[/math] € (donc «pile» seulement après 10 lancers, puisque [math]2^{10} = 1024[/math]), la probabilité tombe à :
\mathbb{P}(X \geq 1000) = \left(\tfrac12\right)^{10} = \tfrac{1}{1024} \approx 0,1 \%.

Autrement dit, les sommes astronomiques qui rendent l’espérance «infinie» arrivent si rarement qu’un joueur réel n’a pratiquement aucune chance de les voir.

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